Interview de David Finck – Faut-il investir dans les SCPI de santé ?
Retranscription de l’interview
Lorraine Goumot : Bonjour à vous tous qui nous rejoignez, nous sommes au cœur de La place de l’immo, il est 11h15 sur BFM Business. Nous allons parler SCPI. Vous avez été nombreuses et nombreux à nous poser des questions sur les SCPI. On va essayer d’articuler une réflexion sur ces véhicules, sur ces produits. Aujourd’hui, nous allons zoomer sur les SCPI de santé. Et notre invité chère Marie.
Marie Coeurderoy : C’est David Fink. Vous êtes Directeur Général d’Euryale. Je sais que vous votre spécialité, c’est les SCPI de santé. Mais on est quand même obligé de faire un topo sur ce qui s’est passé durant l’été sur les SCPI. On va le refaire assez régulièrement toute l’année, on en avait parlé il y a une dizaine de jours mais il va falloir qu’on soit extrêmement pédagogues. Qu’est-ce qui s’est passé sur les SCPI ?
David Finck : Alors c’est très simple. Qu’est-ce qui s’est passé ? L’immobilier a baissé naturellement parce qu’on a eu pendant une période de 15 ans une baisse des taux d’intérêt.
Marie Coeurderoy : Incroyable. On était quasiment à moins d’1% pour les crédits sur 20 ans.
David Finck : Exactement. Et donc là, l’immobilier a pris de la valeur. Aujourd’hui, on est dans un phénomène inverse, c’est-à-dire que la BCE a augmenté les taux directeurs. De ce fait, ça a un impact direct sur l’immobilier.
Marie Coeurderoy : ça veut dire que les prix de l’immobilier sont en train globalement de baisser ? Alors, après sur le résidentiel c’est un peu particulier. Ce n’est pas partout, ce n’est pas la même chose pour tous… Bref. Mais globalement, c’est ça ? C’est qu’on est à l’aube d’une baisse des prix massive de l’immobilier ?
David Finck : Alors massive, ça dépend des classes d’actifs. Parce que dans l’immobilier, il y a beaucoup de classes d’actifs, vous le savez. Il y a le bureau, le commerce, la logistique, le résidentiel comme vous l’avez évoqué, et la santé. La santé a une particularité parce que la méthode de valorisation de cet actif de santé, ce n’est pas une méthode comparative comme on peut avoir dans le bureau ou dans le logement.
Marie Coeurderoy : C’est-à-dire ?
David Finck : La méthode de calcul d’un immeuble, elle va dépendre de valeurs intrinsèques de l’immeuble en lui-même. Ça veut dire que ça va être des paramètres qui vont être liés à la qualité du bâtiment. Ça va être des paramètres qui vont être liés à la durée du bail. Vous savez que dans la santé on peut avoir des baux qui sont très longs, qui peuvent en France être de 12 ans et à l’étranger on peut aller jusqu’à 30 ans. Il va y avoir un loyer. Et puis il y a un autre paramètre qui est la qualité de l’exploitant. Qui est l’exploitant ? Et donc nous allons capitaliser ces loyers, ces revenus.
Marie Coeurderoy : Et ça, ça va porter aussi la valeur ? Parce que vous me parlez de revenus, j’entends rendement. Mais il n’y a pas que le rendement, il y a la valeur. Ça, ça va aussi maintenir une certaine valeur à cet immobilier ?
David Finck : Exactement ! Parce que dans cet immobilier santé, comme vous n’êtes pas dans des méthodes de comparaison, la capitalisation des loyers compte. Et le loyer va être indexé sur l’inflation, donc naturellement il va progresser, et donc de ce fait-là, je ne dis pas qu’il ne va pas perdre un peu de valeur. Mais en tout cas, il va être beaucoup moins volatil que les autres classes immobilières que l’on voit. Et vous avez vu récemment que celles qui ont le plus souffert, c’est plutôt les classes d’actifs de bureaux et un petit peu de commerce.
La santé a une particularité : la méthode de valorisation de cet actif n’est pas une méthode comparative comme on peut avoir dans le bureau ou dans le logement.
Marie Coeurderoy : C’est ça, donc on va le dire ce qui s’est passé pendant l’été, c’est que, à l’image des prix globaux de l’immobilier, on a des valeurs de part de SCPI – puisqu’on rappelle qu’avec la SCPI on achète des parts de SCPI, des petits morceaux d’immobilier – là ces valeurs, elles ont été abaissées. C’est ça l’idée ?
David Finck : Exactement. L’AMF a demandé à l’ensemble des sociétés de gestion de faire une réévaluation du patrimoine.
Marie Coeurderoy : Une étude de la valeur.
David Finck : Exactement, au 30 juin parce que la peur de l’AMF, c’est la protection de l’épargnant. La peur de l’AMF était de se dire il pourrait y avoir des investisseurs qui vont rentrer dans des fonds à un certain prix et, en fin d’année, quand les SCPI vont recalculer les valeurs, il pourrait y avoir des pertes assez significatives pour ces investisseurs. De ce fait, l’AMF a demandé de faire cet exercice. Nous l’avons fait nous-même sur les SCPI santé.
Marie Coeurderoy : Alors verdict ?
David Finck : Nous ne touchons pas à la valeur de notre part de notre SCPI Pierval Santé. Mais vous le regarderez aussi sur les 15 SCPI qui ont baissé, comme je le disais c’est plutôt le commerce et on va dire le bureau essentiellement. Mais en santé, aucune des SCPI n’a rabaissé sa valeur.
Marie Coeurderoy : Vous l’aviez même augmenté récemment ?
David Finck : Exactement, on l’a augmenté en fin d’année 2022 parce que on considère que les perspectives de ce marché sont extrêmement favorables.
Aucune des SCPI de santé n’a rabaissé sa valeur de part.
Lorraine Goumot : Alors, deux choses, on va y revenir. D’abord je vous renvoie, on parlait de l’AMF et des paniques sur les marchés avec les SCPI. L’AMF a publié un rapport pour éviter la panique, vous pouvez le consulter très facilement sur le site de l’AMF. Ensuite, on va revenir au sous-jacent de votre secteur. Est-ce que vous pourriez David nous rappeler quelques chiffres ? Qu’est-ce que ça veut dire le marché de la santé ? Et par exemple, les prévisions démographiques sur votre secteur et ultimement sur les SCPI de votre secteur ?
David Finck : Alors, très rapidement, parce que la santé c’est beaucoup de choses. ça va être deux grandes catégories : on va dire l’hébergement (les EHPAD, les résidences services seniors) et le volet du soin (les cliniques, les maisons médicales, les centres de radiologie, de radiothérapie). Et même ça peut aller dans un environnement un peu plus large, puisqu’on fait du life science nous. On peut financer aussi des laboratoires de recherche médicale ou pharmaceutique. Vous voyez c’est très large, et en plus c’est européen. Ce que vous disiez tout à l’heure c’est vrai, on est sur un marché qui va se développer extrêmement fort dans les prochaines années, parce que c’est la suite et la conséquence du Papy Boom. Je vais vous donner un chiffre qui est assez sidérant : la part des personnes de plus de 80 ans en Europe entre 2020 et 2050, elle va progresser de plus de 22 millions de personnes. Je vous laisse imaginer ce que ça peut avoir comme conséquences sur le secteur de la santé.
Marie Coeurderoy : C’est c’est là où vous faites la différence entre les bureaux, le commerce, etc. Où il y a eu quand même d’énormes points d’interrogation au moment du COVID. Encore une fois, il faut que ça puisse répondre à des besoins. On a beaucoup posé la question de savoir comment aller exister le bureau de demain, etc. En revanche, en termes de problématique de santé, de nécessité d’hébergement pour les personnes âgées, etc. ça pour le coup, il n’y a pas de questions là-dessus.
David Finck : Non, parce qu’on est dans un marché de sous-offre aujourd’hui. L’offre n’est pas suffisante par rapport à la demande et la demande va exposer. Pourquoi elle va exploser ? Parce que plus vous vieillissez, plus vous allez être consommateur de soins de santé, à la fois parce que vous allez aller plus régulièrement chez un médecin et en plus, à un moment donné, avec la dépendance, vous serez obligé d’être hébergé dans un établissement spécialisé. Les personnes vont venir plus longtemps et elles vont être plus nombreuses. Je vous laisse imaginer le besoin qu’il va y avoir sur les 25 prochaines années en France et en Europe. Et c’est là où on intervient, en accompagnant les exploitants du secteur de la santé, en portant leur immobilier. Parce que ces exploitants qui ont besoin de se développer font le choix de ne pas porter l’immobilier. Ça coûte beaucoup d’argent de financer de l’immobilier et ils préfèrent mobiliser à la fois leur capacité d’investissement et leur fonds propres sur les activités opérationnelles.
Marie Coeurderoy : Mais sur les exploitants, les différents scandales qu’il y a pu y avoir notamment sur les EHPAD, est-ce que ça c’est quelque chose aussi qui a touché les SCPI de santé ou pas du tout ?
David Finck : Bien évidemment ! En ce qui nous concerne, on n’a pas été mis dans cette tourmente parce qu’on n’a pas d’établissement du groupe Orpea. Mais on a mis en place chez nous un comité de qualité qui permet d’appréhender au mieux, au moment de l’acquisition, la qualité des soins qui sont délivrés dans les établissements. Notre objectif,ce n’est pas de s’immiscer dans la gestion de nos exploitants mais d’avoir une relation de proximité avec eux pour essayer d’engager un dialogue pour qu’on ait le meilleur service rendu aux résidents. Le vrai problème qu’il y a aujourd’hui, c’est plutôt un problème de pénurie de personnel dans les établissements. Ce n’est pas que les exploitants ne veulent pas faire au mieux leur travail d’accompagner les résidents. Mais quand vous avez une pénurie de main d’œuvre, c’est compliqué.
Marie Coeurderoy : Par contre, en termes de remplissage, est-ce que ça, c’est aussi un truc important ? Effectivement, vous parliez de l’aspect démographique, des besoins d’un marché en sous-offre. On sait que le sujet ça va être aussi le taux d’occupation des biens immobiliers qu’on peut acheter en SCPI. Est-ce que là vous avez des taux d’occupation qui sont très forts ?
David Finck : Oui, les taux d’occupation sont très élevés. Ils sont aujourd’hui aux alentours de 98 %. Même si on a connu, il faut le reconnaître, suite au COVID une baisse des taux d’occupation. Donc en fait, aujourd’hui, les taux d’occupation sont aux alentours de 95/96%. Mais comme on a une pénurie d’offre et que la demande est de plus en plus importante, les opérateurs vont revenir à des conditions avant COVID.
Marie Coeurderoy: Vous êtes d’accord, pour ceux qui nous écoutent et qui nous regardent, ça doit faire partie des points de vigilance quand on veut acheter en SCPI ? C’est se dire « ok, je vais acheter mais est-ce que vraiment je vais avoir les locataires qui vont me payer le loyer en fait ? »
David Finck : Alors ce n’est pas trop à l’investisseur, c’est plutôt à nous, société de gestion, à faire ce travail.
Marie Coeurderoy : Mais vous communiquez là-dessus à l’investisseur ? Parce qu’il peut y avoir des sociétés de gestion, je n’accuse personne, qui pourraient me faire croire que la SCPI est super et qu’elle est très bien gérée et qu’en réalité, si je regarde un peu les petites lignes, je me rends compte que finalement…
David Finck : En ce qui nous concerne, on a un taux d’occupation qui est à peu près à 99%. Mais ça, vous avez l’obligation d’informer votre associé tous les trimestres sur le bulletin trimestriel. Donc il y a une forme de transparence qui est très forte dans les SCPI.
Lorraine Goumot : Justement on va peut-être avoir le temps de finir sur cette question, Nabil nous écrivait la semaine dernière, il s’intéresse à l’investissement dans les SCPI. Il envisage de le faire par mensualités pour étaler son investissement. Est-ce que vous pourriez d’une manière assez pédagogique David lui expliquer comment détecter et analyser les frais liés au SCPI en général et chez vous ?
David Finck : Les frais dans les SCPI, c’est à peu près 10% de frais d’entrée. Mais le rendement est calculé sur le prix global de la souscription. En ce qui concerne votre auditeur, il voudrait faire un versement programmé. Il souhaiterait ne pas faire un investissement par exemple de 10 ou 15 000 euros de suite mais mettre par exemple 300 ou 400 euros par mois. C’est tout à fait possible, les SCPI le prévoient. C’est un modèle qui a petit peu évolué parce qu’on se dit qu’il est peut-être bien mais de commencer de prévoir sa retraite très tôt.
Marie Coeurderoy : C’est une façon d’épargner ?
David Finck : C’est une façon d’épargner sur quelque chose qui s’appelle l’immobilier, qui a beaucoup de résilience, surtout dans la santé, et qui va permettre à terme d’avoir des revenus récurrents. Les rendements ne sont pas garantis.
Marie Coeurderoy : mais dans ce cas concret, notre auditeur est-ce qu’il aurait davantage de frais à fonctionner mensuellement ou pas du tout ?
David Finck : Non, il n’en a pas plus, pas moins. La seule chose qui va varier, si je puis dire, c’est le délai de jouissance qui est à chaque mois où il va souscrire, il va redémarrer. C’est le seul petit inconvénient qu’il peut y avoir dans ce modèle de versement programmé.
Marie Coeurderoy : Juste un mot, je sais que votre spécialité c’est les SCPI de santé. Mais quand même une question. On nous a beaucoup dit à chaque fois qu’on parle SPCI, il faut diversifier, ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier. On sait qu’effectivement il y a quelques petites problématiques sur le bureau, sur le commerce. Est-ce que là vous pourriez conseiller véritablement à un épargnant de tout mettre sur de la SCPI de Santé ? Ou est-ce que vous pourriez lui dire : essayez de varier les plaisirs, après tout, on ne sait jamais ?
David Finck : Je vais vous dire la meilleure chose à faire, c’est la diversification patrimoniale. Mais dans la santé, on a déjà une forme de diversification. Dans notre SCPI, on a une double diversification. La première, c’est les natures d’actifs que je vous ai exposées.
Lorraine Goumot : Vous avez dit hébergement, résidence, soins, recherche…
David Finck : Exactement, life science… Et puis on a une deuxième forme de mutualisation par les zones géographiques. Aujourd’hui on est implanté sur 10 territoires en Europe. On est déjà dans une forme de diversification avec un sous-jacent spécialisé sur la santé. Mais bien évidemment que si votre investisseur a les moyens, il faut qu’il aille sur plusieurs classes d’actifs.
Marie Coeurderoy : Et le rendement ? On sait très bien que le rendement immédiat, la plus-value en sortie on sait pas. Donc déjà le rendement aujourd’hui vous êtes à combien ?
David Finck : On a servi un rendement au titre de l’exercice précédent de 5,35% avec un énorme avantage fiscal puisque 70 % de nos loyers sont payés en Europe. Le fonds paie les impôts à l’étranger et donc notre souscripteur y trouve un grand intérêt parce qu’il ne paye pas de CSG sur les 70% de revenus étrangers et très peu d’impôts sur ces 70%. Il y a un effet fiscal assez attractif dans notre SCPI aussi.
Lorraine Goumot : Voilà, merci beaucoup David Fink, Directeur Général d’Euryale, d’avoir été avec nous. Merci Marie d’être revenue. Je vous rappelle quand même qu’investir dans des SCPI ça présente des risques. C’est un investissement à long terme. Il faut le rappeler évidemment pour ceux qui nous suivent, pour ceux aussi avec qui et bien on traite ces sujets pour la première fois.
Avertissement
Investir en SCPI comporte un risque de perte en capital. Il s’agit d’un investissement long terme pour lequel la liquidité peut être limitée et dont le capital et les revenus ne sont pas garantis.
La SCPI est soumise à d’autres risques tels que notamment le risque de change, de durabilité et le risque lié à une gestion discrétionnaire.